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Un droit au logement de moins en moins opposable : la deuxième version du projet de loi

Une seconde version du projet de loi « instituant le droit opposable au logement » circule actuellement. Elle a été publiée sur le blog répertoire des maires (un blog de l’éditeur « décisions locales ») où elle peut être téléchargée.
 
Cette seconde version comprend des différences importantes par rapport à la première dont on peut donner la tonalité générale : de très sensibles régressions sur le fond malgré quelques améliorations techniques.

Une seconde version du projet de loi « instituant le droit opposable au logement » circule actuellement. Elle a été publiée sur le blog répertoire des maires (un blog de l’éditeur « décisions locales ») où elle peut être téléchargée.
 
Cette seconde version comprend des différences importantes par rapport à la première dont on peut donner la tonalité générale : de très sensibles régressions sur le fond malgré quelques améliorations techniques.
 
I : Des régressions sensibles
 
- le droit au logement des étrangers sensiblement restreint
 
C’est sans doute la restriction la plus importante.
 
On avait déjà souligné que la précédente version du texte limitait aux personnes pourvues d’un titre de séjour régulier le bénéfice de ce droit. Cette fois, l’article 1er est à la fois plus dur et plus vague : le droit opposable au logement ne vise que les étrangers « autorisés à séjourner sur le territoire français de façon durable ».

Compte-tenu des évolutions de la nature et des durées des titres de séjour, en particulier depuis la loi Sarkozy 2, on peut se demander quelles seront les personnes de nationalité étrangère qui pourront bénéficier de ce droit. Il est fort peu probable que ceux des étudiants qui bénéficient d’un titre de séjour d’un an renouvelable en fassent partie, il est très loin d’être certain que les ceux qui bénéficient, en vertu de différentes dispositions d’un titre de séjour de 3 ans soient concernés par le texte. Le durcissement est donc très sensible, mais il est doublé de cette imprécision de vocabulaire qui donnera à la commission puis au juge un pouvoir d’interprétation très large.

On ajoutera, s’agissant des sans abris, qu’il est bien connu qu’une part significative d’entre eux est dépourvue de titres de séjours, soit qu’il n’y aient pas droit, soit que compte-tenu de leur degré de désocialisation ils n’en ont pas sollicité.

Ceux-ci sont alors, purement et simplement exclus du bénéfice du dispositif.

Voilà donc une manière de faire des exclus parmi les exclus. Beau tour de force !

- l’inspiration anglo-saxonne des conditions posées à l’article 1er

On a beaucoup parlé, ces derniers temps, du fameux exemple écossais. Mais pour qui regarde les textes, on constate que les conditions d’accès au logement sont soumises à des conditions très typique de l’univers anglo-saxon fondée sur la promotion de la responsabilité individuelle.

Ces logiques ont été reprises (recopiées serait plus exact) dans la nouvelle version du projet de loi. Ainsi une personne qui a « créé elle-même sa situation de mal logée » est exclue du droit. J’avoue demeurer plus que perplexe et inquiet devant cette formule.
Est-ce qu’une femme qui quitte le domicile conjugal en raison d’un mari violent se trouve dans cette situation ? Non, certes, mais à condition de pouvoir prouver (devant une commission qui est spécialisée dans le logement) les craintes qu’elle a pour son intégrité physique.

Est-ce qu’une personne atteinte de trouble psychologiques et qui glisse vers la rue se trouve dans cette situation. Non certes, à condition de pouvoir établir la nature de ces troubles psychologiques, là encore devant une commission qui est tout sauf une commission médicale.

Autant dire que l’ouverture ou la fermeture du droit au logement dépendra d’interprétations de concepts très flous, à la seule discrétion de la commission départementale.

- l’absence de délai pour statuer de la commission

Comme dans le texte originel, le bénéfice du droit opposable des plus mal logés est conditionné au fait que leur dossier soit déclaré « prioritaire » par la commission départementale de médiation.

Mais, il y a deux problèmes majeurs.

1 – il n’est pas prévu de recours contre la décision de cette commission de ne pas déclarer le dossier prioritaire. Autrement dit, il faudra entreprendre un contentieux classique devant les juridictions administratives.

2 – il n’est pas prévu de délai pour que soit rendue la décision de classement prioritaire. Actuellement, ces commissions statuent dans un délai de trois mois environ. Mais devant l’afflux des dossiers, on peut parier sur un allongement de ce délai.


II : des améliorations techniques

Outre une incontestable amélioration rédactionnelle, le texte précise que le juge des référés statue en matière de « référé urgent », ce qui accélerera la procédure juridictionnelle. Par ailleurs la date de bénéfice du droit est avancée dans les communes qui auront signé une convention avec l’Etat.

Ah oui, ne pas oublier : il est créé un « haut comité de suivi de la mise en œuvre du droit opposable au logement », haut comité qui outre des membres nouveaux comprend tous les membres du « haut comité pour le logement des personnes défavorisées ».

Un haut comité dans un haut comité. Magnifique ! l’imagination administrative française n’a plus de limites.


Mais trève d’ironie. Ce qui caractérise cette nouvelle version du texte c’est donc bien une réduction des bénéficiaires du droit par rapport à la version initiale. Et par ailleurs, aucun des problèmes que j’avais souligné dans ma précédente analyse ne sont réglés.

Le mouvement s’était engagée sur la base d’une action médiatique. Il y a fort à penser que la réponse ne soit elle même que médiatique. Je craignais dans ma précédente note un projet cosmétique. Cette nouvelle version du texte confirme et conforte cette analyse.

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